jeudi 25 octobre 2012

Au coeur du Mexique populaire...



Flânerie dans les rues de Mérida, au hasard des rencontres... Mon but est de laisser de côté les monuments de la ville coloniale pour me rendre dans les rues populaires et y sentir battre le pouls de la ville. Je veux notamment découvrir le marché, el mercado. 

Départ depuis le Zocalo, la place centrale. Visite rapide de la cathédrale. Deux statues retiennent mon attention, la magnifique Dolorosa, si réaliste, et le San Charbel Makhlouf, dont les bras sont recouverts de rubans multicolores. Je m’approche et constate que ce sont des prières d’intercession. Je lis, retiens celle-ci : « San Charbel, te pido que ayudes a mi hijo Saïd-Emmanuel, para que pueda comer… » le reste se perd dans les plis du ruban. (« Saint Charbel, je demande ton aide pour mon fils Saïd-Emmanuel, pour qu’il puisse manger. ») 

 


Tout le Mexique est là, dans ces deux statues. Le noir et la couleur. La dévotion d’un peuple démonstratif dans ses croyances religieuses et le profane qui côtoie le sacré, lui redonne des couleurs, ici dans l’amoncellement des rubans colorés.

Sur le parvis du Palais de l’Indépendance, je rencontre Ernesto, Mexicain volubile qui se propose de faire un bout de chemin avec moi et qui est heureux de m’entendre parler espagnol : « Hablar español es mejor para ti y para mi » me dit-il (« parler espagnol, c’est mieux pour toi et moi. »).

Il veut savoir qui je suis, d’où je viens, pourquoi je suis là. Nous bavardons un bon moment, puis je lui propose de le prendre en photo. Il est surpris, ne comprend pas. Il insiste pour me prendre en photo devant les monuments et je lui répète que c’est lui que je veux prendre en photo. Finalement il se laisse faire, découvre la photo en disant « Ah que je suis gros ». Et au moment où nous nous séparons, il a cette dernière phrase : « N’achète pas dans les magasins pour touristes, achète chez les Mayas, ils en ont besoin. »


Une dizaine de minutes de marche depuis le Zocalo, et c’est déjà une autre ville, grouillante d’une population laborieuse. Les commerces sont nombreux, on vend et on achète de tout, peu d’enseignes internationales, ici dominent les petits magasins, les échoppes et les vendeurs des rues. Me voici dans le dédale des ruelles qui annoncent le marché. Je tombe d’emblée dans le quartier de la viande, dont le moins qu’on puisse dire est qu’il met les sens en émoi.


Je me retrouve dans les légumes, rigole avec deux vendeuses qui font des mines lorsque je leur propose de les photographier, croise un couple et sa petite fille qui viennent se restaurer. Alejandro me présente sa femme Magali et leur fille Priana. Je les prends en photo puis poursuis mon chemin. 

Je tombe sur Roberto, qui me fait essayer ses chapeaux. « Francia ? Charles de Gaulle ! » dit Roberto qui met un point d’honneur à me citer tout ce qu’il sait de la France. « La République française ! » dit-il en Français, de façon admirative. « Combien de Républiques en France ? » me demande-t-il. « Trois ou quatre ? » Questions saugrenues dans ce lieu, mais qui réconfortent quant à la circulation et au partage des idées démocratiques. Je lui réponds que nous en sommes à la cinquième. Je fais le geste de la main, qu’il reproduit de son côté. Lorsqu’enfin vient le moment de la photo, le voilà qui prend la pose, en fait des tonnes, essaie plusieurs chapeaux, s’amuse à l’évidence. J’ai l’impression d’être le vendeur et lui le client. Pour un peu je le foutrais à la porte de mon échoppe. Il me tape sur l’épaule, m’appelle Luc, nous sommes les meilleurs amis du monde. Je ne suis pas dupe, et je mets sa sympathie sur le compte de la tactique pour me vendre un chapeau, mais même pas. Quand je lui dis que je ne veux rien, il laisse tomber sans insister et on dirait même qu’il s’en fout. Il dit « Reviens quand tu veux, on va parler de la France. »


Je suis séduit par l’accueil des Mexicains, par leur simplicité et leur générosité.
Sur le chemin du retour, coup d’œil sur l’entrée de la Casa de Montejo, vieille maison espagnole du XVIème et dont le portique chargé présente une sculpture emblématique de cette époque. Un conquistador domine de sa superbe un personnage velu à gourdin qui semble être une représentation d’un Maya. Je suis stupéfait. Pour asseoir leur pouvoir, les espagnols ont présenté les Mayas comme un peuple inférieur, sans culture ni connaissance des arts. De quoi batailler avec la douleur pendant des siècles.
Et pourquoi pas la noyer dans l’alcool ?
Dans la rubrique « au Mexique aussi », je tombe soudain sur la permanence des Alcooliques anonymes.
La boucle est bouclée : de La Dolorosa de la Cathédrale à la permanence des Alcooliques Anonymes… une journée de flânerie dans les rues de Mérida.

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